L’histoire des champions du monde d’échecs n’est pas une simple succession de champions, aussi hors du commun soient-ils. Pour être champion du monde aux échecs, il faut avoir compris le jeu de son prédécesseur et des grands joueurs de son époque et avoir apporté un petit plus qui fait la différence. L’histoire des champions du monde suit donc l’évolution du jeu d’échecs, chaque champion menant le jeu d’échecs à un niveau de compréhension supérieur. De Wihlelm Steinitz à Magnus Carlsen, voici l’histoire des champions du monde d’échecs.

Un petit test avant de commencer ?

Testez votre culture générale sur les grands champions d’échecs !

 

Avant les champions du monde, l’époque romantique et Paul Morphy

Si vous avez bien suivi, pour bien comprendre le jeu du premier champion du monde officiel Wihelm Steinitz, il faut étudier les champions qui le précèdent. Ces champions font pour nous partie de l’histoire des champions du monde d’échecs. Nous sommes alors au XIXème siècle, et c’est le temps des échecs romantiques : on veut gagner aux échecs, oui, mais en menant une attaque spectaculaire, avec une grosse prise de risque et des sacrifices à tout va !

Le personnage le plus marquant de cette période est sans doute Paul Morphy. Paul Morphy est un enfant prodige. Il apprend les règles tout seul et à 9 ans, il est considéré comme le plus fort joueur de la Nouvelle-Orléans aux États-Unis ! À 20 ans, il sera le premier champion des États-Unis avant d’aller en Europe pour affronter les meilleurs joueurs d’échecs de l’époque.

Cela ne vous rappelle rien ? La trajectoire de Paul Morphy a inspiré la célèbre série Netflix « Le jeu de la Dame ». Beth Harmon, l’héroïne, va lutter elle aussi pour le titre de champion des États-Unis avant d’aller défier les européens sur leurs terres.

Paul Morphy, tout pour l’attaque !

Du jeu de Paul Morphy, on peut apprendre comment mener une attaque, comment prendre l’initiative et comment profiter d’un Roi adverse resté au centre. Voici une de ses plus belles attaques.

Trait aux blancs :

Ce qui est bien avec les parties de Paul Morphy, c’est qu’en plus d’être de toutes beautés, elles sont très instructives ! Paul Morphy nous donne la technique principale d’attaque contre un Roi resté au centre de l’échiquier : il faut ouvrir les lignes !

1. e5 !! dxe5

Le Roi noir est coincé au centre pour l’instant grâce au Fou a3 qui contrôle la case f8. Les noirs vont tenter de le mettre à l’abri à l’aile-Dame. Paul Morphy joue maintenant deux coups pour renforcer sa positon avant de porter l’estocade.

2. Tfe1 Fd7 3. Tab1 0-0-0 4. Fa6 !!

Le Roi noir ne sera pas plus à l’abri désormais. Paul Morphy fait voler le roque noir et ouvre au maximum les lignes sur le Roi. Si 4… bxFa6 5. Db3 et le Roi noir ne va pas s’en sortir. Les noirs tentent dans la partie de garder les lignes fermées, en vain…

4… Ca5 5. Tec1 !! Fc6 6. Dxa5 bxa6 7. Dxa6 + Rd7 8. Txc6 Df5 9. Txc7 avec une attaque irrésistible.

Faites-bien attention au rythme des premiers coups joués par Paul Morphy. Un premier coup rapide qui force le Roi noir à rester au centre. Deux coups de renforcement plutôt lents avant un autre coup d’attaque « rapide ». Lors de vos parties, vous pouvez toujours vous demander si vous devez jouer un coup plutôt rapide qui va forcer les évènements ou un coup plutôt lent qui va renforcer calmement votre position.

Les plus belles combinaisons de Paul Morphy

Voici maintenant son attaque de mat la plus célèbre. Cette partie a été jouée à l’opéra de Paris en 1858.

Les blancs jouent et matent en 2 coups :

Tout la partie est très belle évidemment, mais c’est cette position qui est restée dans l’histoire. Encore une fois Paul Morphy a profité du Roi noir resté au centre de l’échiquier en ouvrant les lignes autour de lui. Le Fou g5 est notamment très important car il contrôle les cases e7 et d8. Il faut maintenant conclure !

1. Db8 !!

Un sacrifice de Dame spectaculaire !

1… CxDb8 2. Td8 mat

Le fameux mat de l’opéra qui fait partie de notre Top 10 des échecs et mats les plus célèbres.

Voici maintenant le seul problème composé par Paul Morphy. Il s’agit d’un petit casse-tête où les blancs doivent réussir à mater en 2 coups. Vous allez voir, c’est très joli !

Les blancs jouent et matent en 2 coups :

Nous aimons beaucoup résoudre des mats en 2 coups. Cela permet de travailler la concentration et la logique en cherchant une idée originale et souvent bien cachée. C’est le cas ici, prenez votre temps avant d’aller voir la solution !

Comment percer la muraille noire ?

1. Th6 !!

Un coup magnifique ! Les noirs ont maintenant deux choix :

  • Si 1… gxTh6 2. g7 mat.
  • Si 1… Fou bouge 2. Txh7 mat.

L’histoire des champions du monde d’échecs : apprendre des maîtres du passé

Nous espérons vous avoir fait comprendre une chose très importante avec ces premiers exemples : on peut apprendre des maîtres du passé. En fait, il faut apprendre des maîtres du passé ! S’inspirer des principales idées apportées par les grands joueurs du passé permet de comprendre en profondeur les différents éléments stratégiques et tactiques du jeu d’échecs et d’en comprendre l’évolution. Le célèbre entraîneur de l’école russe Mark Dvoretsky en fait même un axe majeur de l’entraînement aux échecs.

Le raisonnement par analogie est très présent aux échecs. Comprendre une idée d’une partie qu’on analyse permet ensuite de la réutiliser dans nos propres parties. Nous pourrons donc par analogie utiliser les idées des maîtres du passé dans nos propres parties.

« Sans passé, pas de pensée, et sans analogie, pas de pensée non plus, car l’analogie permet justement cette mise en relation entre présent et passé. » (Hofstadter, Sander, l’Analogie cœur de la pensée)

L’immortelle d’Adolf Anderssen

L’autre grand représentant des échecs romantiques est Adolf Anderssen. Anderssen prône lui aussi l’attaque à tout va et a joué des parties d’attaque exceptionnelles. Voici son immortelle contre le très fort joueur d’échecs Lionel Kieseritzky.

Nous débutons l’analyse ici. Anderssen a déjà sacrifié une pièce pour obtenir cette belle position d’attaque. Le Roi noir est resté au centre de l’échiquier, les pièces blanches sont actives. Mais les noirs ont leurs chances également : le Roi blanc n’a pas fière allure en f1 et si les blancs ne sont pas très incisifs, les noirs en quelques coups auront compléter leur développement.

Vous l’avez compris, il faut donc jouer l’attaque avec les blancs !

1. Cd5 !! Dxb2 2. Fd6

Prise de risque maximale ! Les blancs vont donner leurs deux Tours, dont une sur échec !

2… FxTg1 3. e5 ! DxTa1+ 4. Re2 Ca6

Et maintenant le bouquet final !

5. Cxg7+ Rd8 6. Df6+ !! CxDf6 7. Fe7 mat

Un échec et mat unique !

Adolf Anderssen était considéré comme le plus fort joueur du monde en 1850. Mais c’était avant l’arrivée de Paul Morphy qui le battra en match à Paris. Un autre grand joueur battra Anderssen en match. Il s’agit rien de moins que de Wilheim Steinitz, le premier champion du monde d’échecs.

L’histoire des champions du monde d’échecs : Wilhelm Steinitz, la stratégie au pouvoir

Wilhelm Steinitz fut donc le premier champion du monde en 1886 en gagnant un match contre Johannes Zukertort avec le score sans appel de 10 victoires pour 5 défaites et 5 nulles. Steinitz marque la fin de la période des attaques à tout va. Il parvient très souvent à défendre ses positions contre des attaques qui ne sont pas saines, puis à contre-attaquer en utilisant les faiblesses que son adversaire à dû se créer pour monter son attaque. Voici un exemple de confrontation entre différents style de jeu. On retrouvre Anderssen avec les blancs qui tente d’imposer son style flamboyant contre Steinitz avec les noirs.

Les apports de Wilhelm Steinitz sur la stratégie de jeu d’échecs

Commençons par la chose peut-être la plus importante : Steinitz a montré qu’en finales, on doit utiliser son Roi. En effet, celui-ci n’est plus en danger comme en milieu de jeu et est aussi fort qu’un Fou ou qu’un Cavalier en fin de partie. Si on le laisse dans un coin de l’échiquier et que notre adversaire l’utilise, on sera alors clairement désavantagé. Cet élément de la stratégie du jeu nous paraît maintenant banal, mais à l’époque c’est une révolution !

2ème grand apport de Steinitz : la supériorité du Fou sur le Cavalier dans les positions ouvertes. Surtout quand la paire de Fous s’oppose au duo Fou/Cavalier. Steinitz a gagné d’innombrables parties avec cette configuration de pièces !

Et enfin, Steinitz a montré qu’on peut gagner une partie en accumulant les petits avantages. On crée une faiblesse, puis on rend les pièces de l’adversaire passives en les obligeant à défendre la faiblesse, puis on crée une deuxième faiblesse et le tour est joué !

L’immortelle de Steinitz

La stratégie, c’est bien beau, mais la partie la plus célèbre de Wilhelm Steinitz est une partie d’attaque ! Steinitz a les blancs contre Bardeleben.

Trait aux blancs :

Le champion du monde Wilhelm Steinitz nous offre ici une de ses plus belles parties. Il le doit notamment à la défense héroïque des noirs qui vont tout faire pour faire trébucher leur célèbre adversaire. C’est très intéressant de voir comment Steinitz va évoluer plusieurs coups au bord du précipice.

1. Txe7+ !!

Un premier coup classique d’attaque. Les défenses noires évidentes échouent toutes. Par exemple, si 1… DxTe7 TxTc8+ et si 1… RxTe7 2. Te1+ Rd6 (sur 2… Rd8 Ce6 gagne très vite) 3. Df4+ et c’est vite la catastrophe. Les noirs ne se découragent pas et trouvent un coup de défense extraordinaire.

1… Rf8 !!

L’idée est simple : les noirs font une attaque double. Ils menacent mat en un coup avec Txc1 et ils attaquent la Dame blanche. Steinitz a bien entendu tout prévu. Comme lui, il faut bien chercher les meilleures défenses possibles pour l’adversaire lorsqu’on se lance dans une combinaison. Voici son idée :

2. Tf7+ !!

la Tour est imprenable à cause de Txc8+. Le Roi ne peut pas revenir sur ses pas cette fois à cause de Dxd7 mat. Donc :

2… Rg8 3. Tg7+ !!

La Tour est bien sûr toujours imprenable. Le Roi ne peut toujours pas revenir sur ses pas, cette fois à cause de Cxh7 + suivi de la prise de la Dame sur échecs.

3… Rh8 4. Txh7+ !!

Voici le moment clé. La disparition du pion h7 va permettre à Steinitz de gagner.

4… Rg8 5. Tg7+ !! 1 – 0

Si le Roi noir va en h8, les blancs s’engouffrent dans la position noire : 6. Dh4+!! Rxg7 7. Dh7+ Rf8 8. Dh8+ Re7 9. Dg7+ Re8 10. Dg8+ Re7 11. Df7+ Rd8 12. Df8+ De8 13. Cf7+ Rd7 14 Dd6 mat.

Si le Roi noir préfère partir vers f8, Ch7 suivi de la prise de la Dame sur échec gagne immédiatement.

Une superbe conception de Steinitz !

L’histoire des champions du monde d’échecs : Emmanuel Lasker, la psychologie aux échecs

La suite de l’histoire des champions du monde d’échecs est extrêmement logique. Puisque désormais plusieurs chemins mènent à la victoire, de l’attaque à tout va à la domination stratégique, pourquoi ne pas s’adapter à l’adversaire et utiliser le style de jeu qui lui convient le moins ? C’est exactement ce que va faire avec brio Emmanuel Lasker ! Celui-ci considère que le jeu d’échecs est un combat et qu’il ne faut pas seulement essayer de jouer le meilleur coup d’une position mais jouer le coup qui va poser le plus de problème à notre adversaire.

Voisin et ami d’Albert Einstein, Emmanuel Lasker était également docteur en mathématiques. Il a travaillé avec David Hilbert (une énorme star des mathématiques) et a publié des articles très importants ce qui a fait dire à Albert Einstein que c’est vraiment dommage qu’Emmanuel Lasker ait privilégié une activité comme le jeu d’échecs par rapport aux mathématiques…

25 ans de règne pour Emmanuel Lasker

Emmanuel Lasker détient le règne le plus long de tous les champions du monde d’échecs : un quart de siècle ! Une domination sans partage qui l’aura vu affronter plusieurs générations de grands joueurs : Marshall, Réti, Nimzowitch, Janovsky, Capablanca pour ne citer que les plus célèbres. Voici une de ses réalisations les plus impressionantes : Lasker- Capablanca, Saint-Petersbours 1914. En 1914, un grand champion commence à pointer le bout de son nez : Raul Capablanca. La rencontre entre ces deux phénomènes ne pouvait déboucher que sur une superbe partie, et c’est Emmanuel Lasker qui l’a emporté, avant que Roul Capablanca ne prenne sa revanche en 1921.

Trait aux blancs :

Cette partie est un grand classique pour exposer comment créer un avant-poste. Le Ce6 est déjà extrêmement bien placé, Lasker va maintenant s’occuper de son Cavalier c3.

1. e5 !!

un magnifique sacrifice de pion pour libérer la case e4.

1… dxe5 2. Ce4 Cd5 3. C6c5 !!

Domination totale ! Regardez le pauvre Fou b7… La Tour d7 est perdue, si elle bouge par exemple en c7, Cd6 fait une fourchette entre le Roi noir et le Fou b7. La partie est gagnée pour les blancs.

À retenir : le sacrifice de pion pour se créer une case forte !

Nous nous attardons maintenant sur plusieurs grands joueurs de l’époque d’Emmanuel Lasker.

Aaron Nimzowitch, le professeur

Le livre d’Aaron Nimzowitch « Mon système » est LE grand livre de stratégie du jeu d’échecs. Nimzowitch a réussi à tirer des règles de stratégie claires et ces règles sont encore suivies par tout le monde de nos jours. Un exploit invraisemblable !

Mais Nimzo est aussi un grand joueur qui a joué de nombreuses parties d’école où il parvient à appliquer brillamment ses concepts. Voici par exemple son fameux zugzwang avec les noirs contre Saemisch en plein milieu de partie.

 

Trait aux noirs :

Mettre son adversaire en zugzwang, c’est l’obliger à jouer un mauvais coup à son prochain coup. C’est extrêmement rare de mettre en zugzwang son adversaire dans le milieu de partie, et c’est l’exploit réussi par le génial Aaron Nimzowitsch dans cette partie.

1… h6 !!

Un coup exceptionnel ! Voyons les possibilités blanches :

  • Le Cavalier ne peut pas bouger, le Fou non plus (s’il va en c1, le Cavalier est perdu), la Tour g1 et la Dame non plus !
  • Si la Tour e1 bouge, les noirs jouent Te2 gagnant la Dame blanche.
  • Si le Roi bouge en h2, T5f3 gagne la Dame (d’où le coup h6 !).
  • La poussée du pion a en a3, ne change pas le problème après a5.
  • Le déplacement du pion b en b3 ne change pas le problème après Rh8 par exemple.
  • La poussée du pion g perd la dame après T5f3 (la Tour est imprenable par le Fou à cause de Th2 mat !).
  • La poussée du pion h ne change pas le problème après Rh8 par exemple.

C’est un formidable zugzwang au cœur du milieu de jeu. Exceptionnel !

La paire de Fous de Janovsky

Un grand débat a agité le début du XXème siècle entre David Janovsky et le docteur Tarrasch : entre la paire de Fous et la paire de Cavaliers, laquelle est la plus forte ? Si Tarrasch préférait les Cavaliers, Janovsky ne jurait que par les Fous comme on va le voir dans une partie jouée contre Saemisch en 1925.

Trait aux blancs :

David Janowsky a donc mis en lumière la force du Fou par rapport au Cavalier dans les positions ouvertes et notamment la force de la paire de Fous pour attaquer. Une position ouverte est une position dans laquelle beaucoup de diagonales, de rangées et de colonnes sont libres. Dans ce cas, Le Fou, qui peut agir des deux côtés de l’échiquier en même temps, est plus fort qu’un Cavalier. Et cela est renforcé par la présence de pions passés. Ainsi, un Fou peut stopper le pion passé adverse tout en soutenant son propre pion passé ce que ne peut pas faire un Cavalier.

Revenons à la partie, les deux Fous de Janowsky sont braqués sur le Roi noir. Janowsky, qui aimait le beau jeu, ne va pas passer à côté d’un des plus jolis échecs et mats de l’histoire !

1. Dh6 !!

Magnifique ! La Dame est imprenable à cause de Tg3 mat (regardez comme les deux Fous immobilisent le Roi noir). Les blancs ont deux menaces Dxg7 mat et Dh7 mat.Voici les variantes principales :

  • Si 1… gxDh6 2. Tg3 mat !
  • Si 1… f5 2. Fc4+ !! DxFc4 3. Dxg7 mat
  • Si 1… f6 2. Dh7+ Rf7 3. Dxh5 Re7 (Si 3… Rg8 4. Fh7 puis Fg6 et Dh7 mat) 4. Fxd6 Dxd6 5. 0-0-0 et le Roi au centre de l’échiquier n’a aucune chance de s’en sortir.

Les noirs ont abandonné après 1. Dh6.

L’école hypermoderne de Richard Reti

Aux échecs, de tout temps, des joueurs ont tenté de jouer un peu différemment que les autres. C’est le cas de Richard Réti qui créa l’école hypermoderne toujours au début du XXème siècle. L’idée de jeu de cette école est de dire que le centre ne doit pas forcément être occupé par des pions mais plutôt doit être contrôlé à distance par les pièces. Voici la première fois où Richard Réti a mis en œuvre cette technique : Réti – Yates , New York 1924.

Trait aux blancs :

Jusqu’à Richard Réti, on pensait qu’il était obligatoire de contrôler le centre avec ses pions. Mais Réti va montrer au monde entier qu’une autre technique de développement est possible dans l’ouverture : contrôler le centre avec ses pièces. Pour cela il va développer ses fous en fianchetto (b2 et g2), placer ses Cavaliers vers le centre et envoyer à la bagarre uniquement son pion c (dans la position ci-dessus, le pion c4 a été échangé). c’est l’école hyper-moderne !

La manœuvre suivante est devenue très célèbre et a permis à Reti de remporter de nombreux succès :

1. Tc2 !! Fd7 2. Da1 !!

La Dame laisse le passage à la Tour f1 pour doubler sur la colonne c. Placée en a1, elle forme une batterie redoutable avec le Fou b2 et met une forte pression sur le centre noir. Certainement une des conceptions de l’ouverture les plus belles de l’histoire !

La plus belle combinaison de Richard Réti

Nous sommes en 1924 à New-York et Réti avec les blancs rencontre Bogoljubov.

Trait aux blancs :

Les pièces noires ont l’air assez bien placées et organisées pour défendre le Roi noir. Mais un coup surprenant de Richard Réti va tout changer.

1. Fe8 !! 1-0

Les combinaisons les plus simples sont souvent les plus belles ! Le Fou blanc est le grain de sable qui fait dérailler la belle mécanique noire. Ils sont complètement démunis contre 2. Df8, la partie est perdue… Réti, connu pour avoir inventé de nouveaux concepts dans les ouvertures, montre qu’il sait également faire preuve de créativité concernant le milieu de jeu !

Richard Réti est également célèbre pour son étude qui a marqué des genérations de jouers d’échecs !

L’histoire des champions du monde d’échecs : la simplicité et la fluidité de Raoul Capablanca

Revenons à nos champions du monde ! Il fallait bien que le règne d’Emmanuel Lasker se termine et c’est une autre légende des échecs qui y mit fin : le cubain Raoul Capablanca. Très charismatique, le champion cubain est très connu pour la fluidité et la simplicité de son jeu. Ses pièces semblent se positionner très naturellement sur leur meilleure case, le jeu se déroule tranquillement et implacablement Raoul Capablanca assoit sa domination jusqu’en finale où il excelle. À son sommet, il est resté 6 ans invaincu !

Il est également connu pour quelques maximes restés très célèbres dans le monde des échecs :

On peut en tirer plus d’utilité d’une partie perdue que de cent parties gagnées.

On n’a jamais que l’âge auquel on a commence à jouer aux échecs, car après on cesse de vieillir.

Mais la citation d’échecs la plus marquante est peut-être celle dont Raoul Capablanca est lui-même le sujet. Elle vient de son prédecésseur Emmanuel Lasker :

J’ai connu beaucoup de joueurs d’échecs mais un seul génie : Capablanca

La plus belle finale de Raoul Capablanca

Cette finale est peut-être la finale la plus célèbre de l’histoire des échecs. Capablanca a les blancs contre Tartakower (New York 1924).

Trait aux blancs :

Avec cette partie, le génial champion du monde cubain Raul Capablanca nous apprend qu’en finale de Tours, l’activité prime sur le matériel. Il va donner deux pions pour faire entrer son Roi en jeu. Les trois coups suivants sont entrés dans la légende.

1. Rg3 !! Txc3+ 2. Rh4 !! Tf3 3. g6 !!

Et voilà l’idée fantastique de Capablanca, il va glisser son Roi par la diagonale h4-d8 au cœur du jeu noir.

3… Txf4+ 4. Rg5 Te4 5. Rf6

L’activité primant sur le matériel, Capablanca ne s’occupe pas immédiatement du pion f5.

5… Rg8 6. Tg7+ Rf8 7. Txc7 Te8

La stratégie de Capablanca est couronnée de succès. Après avoir pris les deux premiers pions, les noirs perdent tous les leurs…

8. Rxf5 Te4 9. Rf6 Tf4 + 10. Re5 Tg4 11. g7+ (le pion g7 est imprenable, la finale de pion serait alors facilement gagnante) Rg8 12. Txa7 Tg1 13. Rxd5 1-0

Une finale très instructive.

L’histoire des champions du monde d’échecs : le jeu dynamique d’Alexander Alekhine

Pour contrecarrer le jeu fluide de Raoul Capablanca, il fallait bien sûr un joueur d’attaque, un joueur qui ne laisse pas le temps au champion du monde cubain d’installer son jeu. Son successeur Alexander Alekhine correspond tout à fait à ce profil. Un jeu entreprenant, dynamique mais qui repose sur des bases saines ont eu raison de Capablanca. Ces deux joueurs au style opposé sont d’ailleurs entrés dans la légende. Des générations entières de joueurs ont progressé grâce à la fluidité du jeu de ces deux champions.

Alexander Alekhine a lui aussi dominé de la tête et des épaules son époque. Il a gagné tous les tournois auxquels il a participé de 1929 à 1934 (à l’exception du tournoi d’Hastings 1933-34 où il finit 2ème).

Voici un premier exemple du jeu d’Alekhine lors d’une partie jouée avec les blancs contre Yates en 1922 à Londres.

Trait aux blancs :

Le champion du monde Alexander Alekhine va réaliser une véritable démonstration dans cette partie. Son plan comporte deux parties bien distinctes qui vont se rejoindre lors du bouquet final :

  • Activer son Roi par g3-f4-e5.
  • Doubler les Tours sur la septième rangée.

1. Rg3 !!

1… Tfb8 2. Tc7 Fb5 3. T1c5 Fa6 4. T5c6 Te8 5. Rf4 Rg8 6. h5 Ff1 7 g3 Fa6 8. Tf7 Rh7 9. Tcc7

Les Tours sont doublées. Il faut maintenant faire de la place au Roi blanc.

9… Tg8 10. Cd7 ! Rh8 11. Cf6 ! Tgf8 12. Txg7 !! TxCf6 13. Re5 1-0

 

Cela mérite un diagramme ! La Tour f6 est perdue. Si elle descend en f8 ou si elle se fait défendre par sa collègue en f8, les Tours blanches matent le Roi noir par Th7 suivi de Tcg7.

Une des plus belles marches du Roi de l’histoire !

La plus belle combinaison d’Alexander Alekhine

Jouez comme Alexander Alekhine avec les blancs contre Colle !

Trait aux blancs :

Alexander Alekhine est un des plus beaux champions du monde à regarder jouer. Son style dynamique y est pour beaucoup ! On le retrouve à la baguette dans cette position pour une des plus célèbres combinaisons de l’histoire.

1. DxTd7 !!

La Dame se sacrifie pour gagner la huitième rangée pour ses Tours.

1… Txd7 2. Te8+

Alekhine ne se trompe bien entendu pas de Tour. 2. Tc8 était contré par Td8.

2… Rh7 3. T1c8

De façon assez surprenante, le Roi noir qui semblait si bien protégé au début est pris au piège et ne peut pas s’échapper. Cette partie illustre très bien la force des Tours doublées sur la huitième rangée.

3… Td8 4. Tcxd8 Dxd8 5. Txd8 et les blancs ont une Tour de plus.

L’histoire des champions du monde d’échecs : l’intermède Max Euwe

Alexander Alekhine sera le premier champion du monde à reconquérir son titre. C’est le hollandais Max Euwe qui a vaincu Alekhine en 1935. Chose extraordinaire, Euwe est mathématicien et il pratiquait le jeu d’échecs en amateur ! Euwe est aussi connu pour s’être occupé de la fédération internationale d’échecs de 1970 à 1978. Pour beaucoup, c’est le fait qu’Alekhine soit tombé dans l’alcool qui a permis à Max Euwe de le battre. D’ailleurs, le score du match retour joué en 1937 est sans appel. Alekhine l’emporte 15.5 à 9.5.

Voici une des parties les plus célèbres de leurs confrontations :

La succession d’Alexander Alekhine

Alexander Alekhine est décédé à Estoril au Portugal en 1947 à l’âge de 53 ans en étant toujours champion du monde d’échecs. Pour trouver son successeur, la fédération internationale d’échecs organise un match entre 5 jours : Botvinnik, Euwe, Reshevsky, Keres et Smyslov, chaque joueur rencontrant les autres joueurs 5 fois. C’est le fameux tournoi de La Haye-Moscou 1948.

Et c’est Mikhail Botvinnik qui l’emporta largement avec 14/20 !

L’histoire des champions du monde d’échecs : Mikhail Botvinnik, le scientifique

Avec Mikhail Botvinnik s’ouvre la grande période de domination des champions venus de l’union soviétique. Botvinnik est considéré comme le père fondateur des échecs soviétique. Son influence sera gigantesque, il entraînera notamment les futurs champions du monde Anatoly Karpov et Garry Kasparov !

Mikhail Botvinnik place l’étude des ouvertures d’échecs à un niveau jamais atteint avant lui. Chaque variante est minutieusement étudiée, le niveau de préparation explose littéralement. Il n’y a plus de place au hasard.

Botvinnik a laissé quelques grands classiques dans l’histoire du jeu d’échecs. Nous aimons tout particulièrement cette partie qui illustre parfaitement le principe des 2 faiblesses. Il s’agit de la partie Botvinnik – Zagoriantsky jouée à Sverdlovsk en 1943.

Trait aux blancs :

Cette partie nous apprend qu’une seule faiblesse suffit rarement pour gagner une partie. Il faut ouvrir un deuxième front. Nos pièces, plus actives que celles de l’adversaire, pourront facilement passer d’une aile à l’autre pour attaquer les faiblesses. L’adversaire, passif et sans espace, aura du mal à tout défendre.

Voilà pour le principe, passons donc à la réalisation ! Botvinnik a fixé l’adversaire à la défense du pion isolé d5. Si vous avez bien suivi, il faut ouvrir un deuxième front et y créer des faiblesses. Mais où ? À l’aile-Roi !

1. g4 !!

Un coup fantastique mais complètement logique avec le raisonnement précédent. Les blancs profitent du pion h6 pour affaiblir le roque noir. C’est le Roi noir qui sera la deuxième faiblesse. Regardez bien dans la suite de la partie comment les blancs passent de l’attaque du Roi noir à l’attaque des pions faibles et vice-versa pendant que les noirs souffrent en défense.

1… Dc6 2. g5 hxg5 3. Dxg5 f6 4. Dg6 Ff7 5. Dg3 f5 6. Dg5 De6 7. Rh1 De5 8. Tg1 Tf8 9. Dh6 Tb8 10. Th4 Rf8 11. Dh8+ Fg8 12. Tf4 Tbb7 13. Tg5 Tf7 14. Dh5 Da1+ 15. Rg2 g6 16. Dxg6 Fh7 17. Dd6+ Tfe7 18. Dd8+ 1 – 0

Voilà, c’est terminé pour cette première partie de l’histoire des champions du monde d’échecs. Tal, Fischer, Kasparov et Carlsen vous attendent pour la suite. À suivre très bientôt !

Pour continuer votre lecture, voici les prouesses de Magnus Carlsen et ne partez pas sans avoir découvert notre programme pour apprendre à bien jouer aux échecs en 14 jours !

 

 

Découvrir notre programme gratuit